Liminaire CSE Central 1 et 2 octobre 2025
C’est une crise sans précédent dans l’histoire de France Télévisions que nous traversons. Notre entreprise est prise en étau entre une Cour des comptes qui exige des réformes radicales, une tutelle qui ne nous garantit pas les moyens financiers pour travailler, une direction contestée, des syndicats en colère, des concurrents privés qui attisent les polémiques et nous accusent de tous les maux… Dans ce climat, la droite politique et les groupes médiatiques de Bolloré en profitent pour remettre en cause l’existence même du service public audiovisuel.
Le rapport de la Cour des comptes, est cinglant : déficit en 2025, capitaux propres en chute libre et un modèle économique jugé « non soutenable ». La situation financière est critique. Les actifs de l’entreprise sont (durablement) à moins de 50 % de son capital social. S’il s’agit d’un seuil symbolique et réglementaire, il expose France Télévisions à un risque majeur de perte de crédibilité et de fragilisation durable. Sans recapitalisation, notre capacité à honorer nos engagements à moyen terme, à financer les investissements ou à maintenir une offre de programmes diversifiée est menacée.
La CFDT alerte depuis longtemps sur ces risques. Aujourd’hui, l’intervention de l’État actionnaire est urgente. La Cour des comptes elle-même insiste : des mesures doivent être prises d’ici fin 2026, qu’il s’agisse d’une recapitalisation ou d’une restructuration profonde. Sinon, l’avenir même du service public audiovisuel sera compromis, avec des conséquences en cascade sur l’emploi, la qualité des programmes et la souveraineté médiatique de notre pays.
Mais au lieu de s’attaquer aux véritables déséquilibres, notamment les contrats avantageux des producteurs privés qui continuent à prospérer sur le dos des salariés, la direction affaiblit nos outils de production interne et s’en prend aux acquis sociaux.
Ainsi, la suppression des deux CARS de la Fabrique : un non-sens économique et social. Ces moyens permettent de maîtriser les coûts ET de garantir l’autonomie de la production publique. Leur disparition fragilise toute la filière, ouvre la porte à l’explosion des coûts des prestations externes, détruit des emplois et des savoir-faire au profit d’une externalisation incontrôlée.
La suppression des équipes ICI du national, et d’IV3 avec le transfert de leur activité à FTR Vaise, s’apparente à un contournement des accords en vigueur. Par le biais du « reboutiquage » par FTR, des contenus de France Info pour les diffuser sur France 3, la direction contourne nos accords : combler les journaux régionaux de France 3 par des contenus d’actu nationale et internationale bricolés n’est pas une modernisation, mais une décision unilatérale, coûteuse et irrespectueuse du dialogue social. Supprimer d’abord les éditions nationales de la 3, pour en arriver à une diffusion de sujets France Info dans les JT régionaux, c’était donc l’objectif réel de TEMPO !
La dénonciation de l’accord collectif de 2013 est vécue comme une véritable provocation. Un accord fruit d’années de négociations, un accord d’équilibre entre modernisation et droits sociaux. Aujourd’hui, vos déclarations méprisantes sur le « niveau de vie des salariés » ajoutent l’insulte à l’injustice. Vous exigez des sacrifices des équipes, mais continuez de préserver les privilèges des producteurs privés.
Face à ce mépris, la CFDT dénonce un projet violent et hostile aux salariés, une absence de vision globale et une gestion incohérente. La stratégie numérique, les externalisations, la remise en cause des accords collectifs : tout cela ne constitue pas un projet d’avenir mais un bricolage à courte vue qui fragilise le service public et nourrit la défiance.
Dans le même temps, France Télévisions subit une campagne de dénigrement orchestrée par des médias de la sphère Bolloré, qui accusent notre entreprise de « dérive de gauche ». Une instrumentalisation politique, visant à affaiblir le service public pour mieux préparer sa privatisation.
Madame la Présidente, vos choix ont cristallisé les tensions. En vous attaquant aux salariés, en reniant les accords collectifs et en refusant de remettre en cause les véritables privilèges du système, vous avez choisi la confrontation.
La CFDT vous le dit clairement : les salariés ne doivent pas être les variables d’ajustement d’une gestion défaillante. Sacrifier l’avenir du service public audiovisuel par la rigueur imposée aux seuls salariés, cela ne passera pas. Une bataille sociale se prépare, qui dépassera le cadre de France Télévisions, car ce qui est en jeu, c’est l’avenir même de l’audiovisuel public, ses missions, son indépendance et la place qu’il occupe dans la société.