Rentrée du CSE : tableau noir et nouveau chef d’établissement

Alors autant vous le dire tout de suite, la reprise s’est faite sans grand enthousiasme et avec un mélange d’appréhension et de curiosité. Car si l’année s’annonce aussi studieuse que mouvementée, ce premier CSE de la saison était aussi l’occasion d’accueillir le nouveau chef d’établissement.

Fraîchement nommé directeur du réseau régional, Christophe Poullain reprend donc, ce 27 août 2025, les rênes du CSE après le départ à la retraite d’Isabelle Staes.

Il arrive avec son lot de promesses, son sourire de circonstance et sa volonté affichée de “travailler ensemble et dans le respect mutuel”. C’est mignon. Mais, en deux mandats, les élus ont déjà vu passer 6 présidents. Autant dire qu’ils ne croient plus au Père Noël même si le « petit nouveau » semble avoir pris la mesure du poste… A suivre…

Rétropédalage en règle. Le nouveau directeur veut muscler la tête du réseau. Il veut pouvoir « maitriser ce qui se passe pour accompagner la transformation et mieux gérer les économies, les ETP ». Résultat : il prend ses fonctions avec une nouvelle direction qui retrouve toutes ses prérogatives.

Souvenez-vous en novembre dernier, nous avions assisté à un remaniement inquiétant. Une exfiltration par la tête, une remontée de bulles au niveau supérieur. Une mise à l’abri des cadres dirigeants qui ne laissait plus à la main du directeur du réseau que les directions régionales et la direction de la prévention des risques.

Aujourd’hui, Christophe Poullain reprend la main : « un certain nombre de directions (2 en réalité) reviennent dans le giron régional et la grande nouveauté c’est une direction de la proximité élargie ».

Delphine Vialanet redescend en effet d’un étage et se retrouve à la tête d’une drôle de classe qui regroupe désormais tout le numérique et tous les programmes des antennes régionales du réseau « ICI ».

On est pour notre part dubitatifs…

Même glissade dans les escaliers pour Marie-Laurence Ferracci et le secrétariat général. Là encore ce n’est pas limpide, limpide…

On retiendra : qu’à mesure que les effectifs diminuent, la tête du réseau grossit. Et qu’il n’y a visiblement pas de contrainte d’ETP de ce côté !

Quant aux « opérationnels » qui garantissent la production en interne des programmes régionaux, ils sont priés d’aller s’asseoir au fond de la classe près du radiateur. Sans rien d’autres à produire que le JT, l’année va être longue.

Cette fois on a véritablement passé un cap ! Pas celui de « Bonne Espérance » car on n’a visiblement plus grand-chose à espérer, mais celui du renoncement à nos missions et à la qualité de nos productions.

Dans la grille qui nous est présentée la quasi-totalité des programmes sont externalisés et offrent une vision de la province lourde de clichés.

Exit les sujets de fond, les enquêtes. Place au patrimoine, au meilleur de la quiche lorraine et du moules-frites ! (Cuisine ouverte, le samedi à 20h40) 

Ne zappez pas ! Le meilleur est à venir avec « On vous emmène ici » diffusé dans la foulée du journal du soir et rediffusé le lendemain juste avant le journal de midi. C’est « LE » produit phare de cette rentrée, « LA » véritable innovation sur laquelle la direction a tout misé. Une émission de 7 minutes fabriquée par France 3 Toutes Régions à partir de sujets régionaux reboutiqués et agrémentés d’une interview plateau d’un expert… en visio.

Oui, oui, vous avez bien vu ! (Enfin pas sûr qu’on voit quelque chose à l’antenne étant donné la qualité de ce type d’échanges…)

Impossible, selon la direction, de faire produire cette émission par la région d’origine du reportage, là où le sujet est connu, maîtrisé, et où un invité peut venir en plateau. « C’est une question de moyens » nous explique Stéphanie Lafuente en mission à la direction de l’info. Dijon perd pourtant son émission de 7 minutes produite localement pour diffuser « On vous emmène ici ». Les moyens, ici comme ailleurs, seront réaffectés.

Au moins c’est clair : nous n’avons officiellement plus les moyens de remplir nos missions. Nous n’aurons cependant, comme toujours, aucun chiffre et aucunes statistiques sur la perte d’activité ou le nombre d’émissions produites avec le personnel de l’entreprise. La commission antennes du CSE demande donc que lui soit présenté un état des lieux lors de la prochaine réunion.

Autre nouveauté : « Sans filtre ». Cette émission de débat, diffusée mensuellement le mercredi à 22h30, voyagera en province pour évoquer des sujets de société (la violence liée au trafic de drogues en région Centre Val de Loire par exemple) et pourrait mobiliser un présentateur du cru, voire deux ou trois techniciens. « Si le planning le permet », rectifie immédiatement Stéphanie Lafuente. Les élus du CSE se demandent tout de même pourquoi la présentation a été confiée à Michel Field, 71 ans, qui vient de quitter l’entreprise, qui n’incarne ni l’identité régionale, ni le renouveau de l’audience que la direction appelle de ses vœux. « C’est un choix de la direction d’antenne » se dédouane aussitôt le directeur du réseau. Ou le jeunisme à géométrie variable.

Les matinales radio/télé de 6h30 à 9h demeurent et finiront leur déploiement en 2026 avec les 4 dernières antennes du réseau régional : Armorique, Auvergne (Clermont-Ferrand), Gard-Lozère (Nîmes), et Lorraine (Metz et Nancy).

En attendant, les téléspectateurs recevront la matinale voisine la plus proche géographiquement.

Des matinales de plus en plus musicales avec des images de drones en illustration, et de moins en moins d’information. La direction prend note, avouant « n’être actuellement pas maître du contenu éditorial de ce qu’on diffuse » dans Ici Matin mais dit avoir l’intention de faire changer les choses.

Avec cette grille, c’est l’identité régionale qui est gommée, effacée.

Comme les locales invisibles sur les documents de la direction. Elles ont tout bonnement disparu de la grille de rentrée. Tout un symbole !

Mais une fois de plus nous voyons le mal partout. Stéphanie Lafuente nous rassure : « toutes les régions n’ont pas de locales… alors je ne me suis pas appesantie sur les locales car il n’y a pas de changement pour le moment ». Comprenez qu’il y aura des arbitrages d’ici décembre, que cela concerne peu de salariés, peu de téléspectateurs alors à quoi bon s’en soucier ! Les moyens finiront par être réaffectés.

De toute façon, la plateformisation est en marche. C’est elle qui doit nous sauver, nous rajeunir. Avec elle « les horaires ne veulent plus rien dire » explique le directeur du réseau. Les zones de diffusion non plus. « Le hub c’est France.tv » ajoute Olivier Daube, directeur antennes et contenus des régions.

(Voir la résolution du CSE)

Le revoilà ! L’outil magique, le couteau suisse des programmes. Celui qui doit à terme remplacer tous les logiciels existants (Oscar au siège, Trafic en Outre-mer et Argos dans le réseau), harmoniser les process et répondre aux nouveaux enjeux mais surtout gérer l’ensemble des programmes de France Télévisions durant tout leur cycle de vie, de l’avant-programme à la déclaration des droits d’auteur.

Utilisé au siège depuis novembre 2023, il arrive dans le réseau (Paris Ile de France en octobre et Auvergne Rhône-Alpes début d’année 2026) et sera progressivement déployé jusqu’à mi-2027.

On le sait, le changement organisationnel sera majeur et la faculté de Sherlock a absorbé les spécificités locales du réseau un défi important. La coexistence d’Argos et de Sherlock sera longue et peut-être à l’origine d’une surcharge de travail ; identification d’erreurs et/ou nécessité de doubles saisies. Des fonctionnalités nouvelles (avec la possibilité d’utiliser de l’IA) et de nouveaux utilisateurs apparaitront aussi au fur et à mesure du déploiement.

La Direction semble avoir pris en compte l’accompagnement de ces changements mais, pour éviter de « mauvaises surprises » en termes de surcharge de travail, les élus du CSE réseau estiment que le suivi de cette mise en œuvre progressive dans nos régions ne pourra pas uniquement être réalisé par la Commission nouvelles technologies. Acteurs locaux, salariés et représentants de proximité doivent y être associés. En aucun cas ce projet ou les besoinsen ETP que la formation engendrera ne doivent dégrader l’antenne, les conditions de travail ou l’activité de production régionale !

Impliquer les salariés et leurs représentants en amont d’un éventuel projet d’aménagement ou de déménagement de locaux : l’idée fait son chemin. Lentement… Il aura fallu 2 heures de débats, une expertise et plusieurs préconisations des experts pour que le nouveau directeur du réseau lâche finalement : « on peut intégrer cette réflexion ».

La direction des Immeubles et Moyens Généraux n’est, quant à elle pas convaincue. Pourquoi, en effet, consulter les salariés avant de les entasser dans des open-spaces connectés aux frigos mais déconnectés du bon sens ?  

Elles ne sont plus que 11 maquilleuses en CDI dans le réseau. Et bientôt, peut-être zéro. On vous l’expliquait déjà en février dernier, les départs à la retraite ne seront pas remplacés. La direction préfère externaliser, même quand des CDD sont disponibles.

À Bordeaux, les maquilleuses CDD viennent d’apprendre qu’elles devront répondre à un appel d’offre pour espérer bosser… deux fois 1h30 par jour, pour un salaire mensuel qui ferait rougir le SMIC.

Comble du cynisme : l’appel d’offre impose une clause RSE. Autrement dit : “Soyez responsables pendant qu’on vous précarise.”

C’est l’info de la rentrée : Sierra, montre de sérieux signes de faiblesse. Le logiciel des documentalistes date de 1998. Les utilisateurs alertent sur son obsolescence depuis… 17 ans.

Pourtant, c’est en août 2025 que la direction découvre l’urgence.

Résultat: on relance des ateliers (qui ont déjà eu lieu en 2023) pour… réfléchir à son remplacement.

Pendant ce temps, “Perfect Memory” débarque en Outre-Mer (Réunion et Martinique). Un outil d’indexation, pas documentaire. La direction imaginait le substituer à Sierra dans le réseau mais les salariés sont dubitatifs. Le directeur de l’exploitation du réseau confirme qu’aucune solution n’est privilégiée pour le moment.  

Car bien sûr, l’IA est de la partie. Mais sans cadrage, sans consultation, et sans garantie sur l’emploi.

Malheureusement, Sierra n’est pas le seul outil du réseau à montrer des signes de fatigue. La plus ancienne régie du réseau à Antibes est, par exemple, en piteux état. Elle fait l’objet, comme bien d’autres matériels, d’un MCO, pas pour « Matériel complétement Out » mais pour « Maintien de la Continuité Opérationnelle ».

Un dispositif de gestion de la maintenance de nos équipements de production mis en place par la direction des moyens de fabrication. Il vise à garantir la disponibilité et la fiabilité des équipements nécessaires à la réalisation des activités via un stock de pièces détachées (basé à Toulouse) et un budget de 200.000€ à la disposition de chaque région.

Le bilan 2024 du plan de formation est clair : on forme aux outils (MOSAR, Open Media, …), pas aux métiers.

9 189 stagiaires, 100 441 heures, 3,38 M€… et zéro trajectoire professionnelle.

Une approche ahurissante qui privilégie l’adaptation immédiate aux postes de travail, au détriment des enjeux stratégiques de l’entreprise (anticipation des transformations, gestion des parcours professionnels, compétences d’avenir).

La DRH du réseau reconnaît qu’il y a “des efforts à faire sur les projets professionnels des salariés et sur la transformation » et quel’amélioration est possible « sur les emplois en décroissance ». Selon elle « il n’y a pas de frein mais des projets chronophages qui ont impacté notre plan de formation ».

Absentéisme en hausse, accidents du travail qui s’accumulent et une procédure de prévention qui tourne au bras de fer : les élus du CSE tirent la sonnette d’alarme.

Même les consignes de la direction de la santé au travail (DSQVT) sont trop souvent ignorées. Les demandes des élus comme une journée dédiée aux débats sur l’évaluation des risques pour les représentants de proximité (RP) ou la formation en santé mentale des sauveteurs secouristes du travail (SST) sont repoussées à “après les élections”. Traduction : aux calendes syndicales.

Et pendant ce temps, les enquêtes externes pour harcèlement, confiées à des avocats par la direction, restent lettre morte pour les représentants du personnel. Résultat : aucune mesure de prévention possible. Et l’opacité en guise de politique RH.

Les représentants du CSE réseau au CSE Central ont dû être redésigné suite à une décision de l’Inspection du travail jusqu’aux prochaines élections professionnelles.

Collège ouvrier : pas de candidats

Collège maitrise :   

Titulaires :

  • Pascal Lefebvre CFDT
  • Thierry Pujot CGT

Suppléants :

  • Anne-Claire Duloisy CFDT
  • Laurence Romet FO

Collège cadres :     

Titulaires :

  • Yvonne Roehrig CFDT
  • Pierre Mouchel CGT
  • Jean-Hervé Guilcher CGT
  • Bruno Demange FO

Suppléants :

  • Bruno Espalieu CFDT
  • Chantal Frémy CGT
  • Karine Cevaer CGT
  • Rabéa Chakir-Trébosc CGT

Carine Grivet est désignée RP titulaire à Poitiers en remplacement d’Alain Bortot.

Josiane Etienne est désignée RP suppléante à Poitiers en remplacement de Carine Grivet.

Frédéric Cuvier est désigné RP suppléant à Dijon en remplacement d’Antoinette Seguire, départ en retraite.

Votre représentante syndicale et vos élus Cfdt :

Séverine Dangin, Metz ; Pascal Lefebvre, Lille ; Bruno Espalieu, Lille ; Yvonne Roehrig, Strasbourg ; Frédéric Maillard, La Fabrique Sud ; Nicolas Marousez, Amiens ; Laurence Collet, Antibes.