Ces deux dernières semaines ont été marquées, au siège de Francetélévisions, par une grève de grande ampleur, à laquelle toutes nos organisations syndicales se sont associées, aux côtés de nombreux salariés.
Ce mouvement, massivement suivi par nos amis monteurs, épaulés par de nombreux collègues de la rédaction, JRI comme rédacteurs, chargés d’édition ou camarades du pc info, est un signal puissant qui doit interpeller durablement notre direction, et l’inciter à revoir ses méthodes de fond en comble.
Les messages envoyés lors de cette grève sont multiples, et face à ceux qui seraient aujourd’hui tentés de les minimiser, ou qui les auraient mal compris, il convient de les réaffirmer :
– En premier lieu, cette grève est le témoignage d’une solidarité totale à l’égard de quatre de nos collègues, illustrateurs sonores, injustement écartés, par visioconférence, de notre entreprise. Sur la forme comme sur le fond, chacun de ceux qui ont participé au mouvement, et plus largement tous ceux qui ont exprimé leur soutien à ces collègues, sont choqués des méthodes qui ont été employées. Elles sont étrangères à nos valeurs de service public et ne doivent pas être admises dans notre entreprise.
– Mais ce mouvement a aussi été l’occasion d’exprimer une opposition plus profonde à une forme de mépris collectif : car cette violence exercée à l’encontre de nos collègues illustrateurs s’est doublée d’une volonté unilatérale de redéfinir arbitrairement les prérogatives et la charge de travail des journalistes comme des monteurs, des chargés d’édition comme des collègues du PC info, sans même se soucier de l’impact de cette mesure sur la qualité de nos programmes d’information…
En exprimant conjointement, face à l’empilement des tâches comme au raccourcissement des délais de fabrication, une même inquiétude pour nos conditions d’exercice comme pour notre modèle éditorial, toutes les composantes de l’information ont fait bloc. L’information est un tout. Et chacun, à son poste, y est essentiel à tous les autres.
Pour beaucoup d’entre nous, enfin, cette grève a été l’expression d’une indignation commune : comment, après que les travailleurs de l’info aient été aux avant-postes durant toute cette crise sanitaire, qui n’est d’ailleurs pas terminée, sollicités souvent jusqu’aux limites de l’épuisement, pour la plupart en présentiel dans des conditions très dégradées, éprouvantes aussi bien sur le plan personnel que professionnel, avons-nous pu devenir la cible de cette fermeture arbitraire ?
Comment accepter qu’après de tels efforts, un inconfort présenté au départ comme transitoire et justifié par les protocoles sanitaires, le fameux mode dégradé, puisse finalement devenir une nouvelle norme de travail ? Plus que l’octroi de primes pour certains d’entre eux, tous les salariés qui ont œuvré dans des conditions si difficiles à la continuité de l’information attendaient un retour à la normale, pas de nouvelles coupes sombres ! La crise sanitaire ne peut servir de prétexte à de telles pratiques. C’est pour chacun d’entre nous une affaire de respect et de dignité.
Lors de notre conférence de rentrée, notre direction de l’information comme notre présidente ont affirmé il y a quelques jours vouloir promouvoir un « journalisme de construction ». En interne, il leur incombe donc de préserver tous ceux qui contribuent à construire ce journalisme.
Tous ne sont pas détenteurs d’une carte de presse, mais tous, par leur expertise, contribuent à la qualité visuelle, sonore, et éditoriale de nos rendez-vous d’information. Il faut construire le « journalisme de construction » en ayant à cœur de ne rien détruire de cet écosystème précieux.
En ce début d’année, enfin, Francetélévisions affirmait l’ambition de promouvoir et même de fabriquer par le travail de ses rédactions « plus de démocratie »…
Une noble ambition que nous partageons, mais qui doit d’abord se traduire en actes ici-même.
Pour marquer la sincérité de son attachement à la démocratie, nous invitons la direction, sans plus tarder, à ne plus céder à la tentation du passage en force, et à renouer le dialogue avec tous ceux qui font l’information, plutôt que de les mettre devant le fait accompli.