N°29 - Octobre 2024
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C'EST PAS JOJO

La créativité des salariés et des employeurs en matière d’injure irrigue toute la jurisprudence sociale. On n’est pas toujours licencié pour avoir dérapé, mais attention quand même, c’est un jeu dangereux.
Cet article a été publié pour la première fois le 02/05/2024 par Raphaël Costa, doctorant en droit, sur le site Curiosités juridiques.
Âmes sensibles s'abstenir.

La règle de principe n’a rien de surprenant : les surnoms insultants sont interdits et constitutifs d’un motif de licenciement à coup sûr. Exemple, la série "morceau de merde, hypocrite, menteur, faux cul impuissant, sans couilles, radoteur, bavard comme une vieille" adressée au patron justifie le licenciement. Sort judiciaire identique pour celui qui affuble son collègue des sobriquets suivants "trou du cul, espèce de raclure, l’autre vomi" ou celle qui qualifie sa supérieure de "grosse couille". Ou pour finir, même sous la forme d’une invitation, en l’espèce une "invitation à aller se faire enculer", l’injure adressée à sa responsable justifie le licenciement.


Les tacles subtils ou créatifs souvent sanctionnés


Quid des salariés ou patrons qui pensent limiter les risques en essayant d’être subtils ? Eh bien, ils perdent aussi, la plupart du temps.
Ainsi, a été licencié le salarié désagréable qui, la semaine de Noël, envoie à son collègue un message pour lui dire de revenir d’urgence au travail car "on ne peut pas faire la crèche sans l’âne". Côté patron, la subtilité ne préserve pas du harcèlement moral, comme l’a découvert l’employeur fautif qui avait offert à une salariée de retour d’arrêt maladie : un radioréveil et Le malade imaginaire de Molière.

Affubler sa supérieure du surnom de "petite crotte", justifie aussi le licenciement, même si certains peuvent penser que c’est "mignon". La créativité en matière d’injure ne protège pas non plus du licenciement, comme l’a découvert le salarié versaillais ayant répondu "Va te faire peindre l’anus en rose fluo. On en a plein le cul de faire ton boulot. Nous, on n'a pas eu d’augmentation pour branlage intensif." À l’inverse, des qualificatifs non injurieux ne suffisent pas à justifier le licenciement du salarié, par exemple celui de « pitbull » jeté publiquement à la face d’une collègue.


Le langage grossier, non injurieux, autorisé


Précisons que l’usage de termes grossiers, dès lors qu’ils ne sont pas adressés directement à interlocuteur, sont largement admis. Comme le dit clairement la cour d’appel de Douai, répondre à son supérieur qu’il vous "fait chier" et vous "emmerde", est "certes déplacé et peu révérencieux, mais ne constitue pas pour autant des injures au sens propre du terme".


Les réponses aux provocations largement admises


Le caractère fautif de l’insulte s’apprécie au cas par cas, comme l’a fait la cour d’appel de Rouen en estimant abusif le licenciement d’une salariée ayant appelé son patron "gros tas de merde", dès lors que celui-ci la méprisait ouvertement.

Ainsi, des tacles subtils peuvent être fautifs lorsqu’ils sont infondés, tandis que des injures plus que trashs ne le sont pas toujours : répondre à une provocation de son patron "Si t’as des couilles, tu n’as qu’à me licencier, enculé !", n’est pas une cause valable de licenciement.

La cour d’appel d’Aix-en-Provence a ainsi donné raison au salarié qui, après avoir appris qu’un collègue avait rapporté à la direction qu’il était parti de l’entreprise à 16 h 15 alors que l’horaire officiel est 16 h 30 réagit en allant voir le "collègue" en question pour le qualifier de "mouchard, suceur, balance, merde" à qui il "pisse à la raie ou au cul" (la terminologie diffère entre la rédaction de la lettre de licenciement et celle du jugement – cul étant utilisé par l’employeur et raie par la Cour). Suite à ces injures, la direction l’a licencié. Licenciement que la Cour a annulé, estimant que le mouchardage de la victime était une provocation à laquelle les injures répondaient. N’omettez pas le dernier critère retenu par la Cour pour pardonner ce fait unique dans la carrière de salarié : "les habitudes de langage dans un atelier industriel."


Le cas à part des "entreprises de bourrins"


Cette ouverture prétorienne à l’injure défensive dans un cadre habituel grossier, ici un atelier industriel, s’inscrit dans le sillon de l’arrêt précurseur de la cour d’appel de Rennes qui, en 2007, avait annulé le licenciement d’un salarié ayant qualifié ses directeurs "d’enculés, d’abrutis et de connards", au motif qu’ils n’étaient que "l’expression d’un énervement passager entre deux professionnels du transport". En clair, des routiers.
Et si l’annulation de l’arrêt par la Cour de cassation avait semblé sanctionner cette appréciation, elle s’appuyait surtout sur le fait que le salarié s’était montré à la limite de la violence physique.


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HEURES SUPPLÉMENTAIRES

Soyez vigilants

Les heures supplémentaires donnent droit à une majoration de la rémunération : + 25% pour les huit premières heures supplémentaires, et les suivantes sont majorées de 50%.
Mais il existe un "contingent annuel d’heures supplémentaires". Ce contingent fixe le seuil de déclenchement de la contrepartie obligatoire en repos, à 220 heures par an à France Télévisions (accord collectif). Il est possible de le dépasser, ce qui a des conséquences en termes de repos. On vous explique :
Vous avez effectué plus de 220 heures supplémentaires dans l’année ? Alors une contrepartie obligatoire en repos (COR) vous est due, et ce, pour toute heure supplémentaire accomplie au-delà du contingent annuel.
Cette contrepartie est de 100 % du temps qui dépasse ce contingent. Par exemple : si vous avez effectué 250 heures supplémentaires dans l'année, vous pouvez prétendre à une contrepartie obligatoire en repos de 30 heures. Par ailleurs, les heures supplémentaires effectuées au-delà du contingent restent rémunérées au taux applicable : cette rémunération s’ajoute au repos compensateur.

Comment calculer mon volume annuel d’heures supplémentaires ?

Les heures supplémentaires à imputer sur le contingent annuel sont les heures effectuées au-delà de la durée légale. Pour un contrat de travail à 35H hebdomadaires, les heures à prendre en compte sont celles qui dépassent cette durée.
Si vous bénéficiez de jours de RTT, il faut tenir compte de cette contrepartie. Par exemple, si vous êtes à 39 heures avec RTT, vous décompterez des heures supplémentaires au-delà de 39 heures. Mais attention ! Seules les "heures de travail effectif" sont prises en compte pour déterminer le nombre d'heures supplémentaires imputables sur le contingent. Les RTT et repos compensateurs ne sont donc pas décomptés.

En principe, vous devez être informés du nombre d'heures de contrepartie obligatoire par un document annexé au bulletin de paie. Dès que ce nombre atteint sept heures, vous êtes informé de l'ouverture du droit à contrepartie, et de l'obligation de le prendre dans un délai de deux mois après son ouverture.

Mais à France Télévisions, il semble que ces heures soient englobées dans le décompte de repos compensateurs (que vous trouverez sur "Mon Kiosque").

En Martinique, manifestations contre la vie chère

Depuis deux mois, l’île est le théâtre de mobilisations massives contre la hausse du coût de la vie et la forte inflation. Face à la dégradation du pouvoir d’achat des 350 000 habitants et à la montée des violences, la CFDT lance un appel au dialogue et formule des propositions.

« Les revendications portées par la population martiniquaise sont justes, et elles doivent être entendues à tous les niveaux, affirme Paul-Émile Beausoleil, secrétaire général de la CFDT Martinique. La problématique de la vie chère est une question centrale pour la CFDT, or, aujourd’hui, le pouvoir d’achat des Martiniquais est mis à mal, et cela risque de s’aggraver. » Il n’est pas inutile de rappeler que l’Insee, dans son « Panorama de la pauvreté en Martinique : une diversité de situations individuelles et territoriales », estime à 44 300 le nombre de ménages martiniquais vivant en dessous du seuil de pauvreté – soit 27 % de la population régionale (contre 14,4 % au niveau national) et 32 % des enfants.

L’Institut national de la statistique et des études économiques, dans cette publication, précise que les produits alimentaires sont 40 % plus chers en Martinique qu’en France métropolitaine, que les dépenses liées à la santé y sont plus élevées (+ 13 %) ainsi que celles liées aux services de communication (+ 37 %). Toujours d’après cette note, le coût global de la vie est supérieur de 14 % en Martinique par rapport au reste du territoire national.

Enrayer la spirale infernale

Au-delà des écarts constatés avec la métropole, c’est également la hausse ininterrompue des prix qui inquiète la population et fragilise son portefeuille. En 2023, les prix de l’alimentation ont bondi de 4,6 %, celui de l’énergie de 5,6 %, celui des services de 2,3 %. Ces chiffres sont à mettre en parallèle avec le taux de chômage, qui a, lui aussi, bondi en un an, atteignant 14,3 % au premier semestre 2024 contre 10,6 % au premier semestre 2023, selon le « Tableau de bord de la conjoncture : Martinique ».
Selon la CFDT Martinique, il est grand temps d’enrayer cette spirale. « Cette triste réalité souligne l’urgence d’agir en profondeur afin de permettre à tous les Martiniquais de vivre dignement », alerte Paul-Émile Beausoleil. Et cela doit passer par un dialogue avec l’ensemble des acteurs, ce qui est loin d’être une évidence à ce jour. « Nous déplorons un manque de concertation, alors même que la négociation est possible », alertait la CFDT Martinique dans un courrier adressé au préfet de la collectivité le 24 septembre dernier.

Produire plus localement, une réponse concrète à la crise

En vue de sortir de cette situation très tendue, la CFDT Martinique propose plusieurs solutions. Comme en 2011, déjà, lors de mobilisations massives contre la vie chère, elle avait pris ses responsabilités après trente-huit jours de grève générale. "Cela commence par la nécessaire révision des politiques publiques et économiques, explique Paul-Émile Beausoleil. Aujourd’hui, pour trouver des solutions durables, il est impératif que tous les acteurs, les partenaires sociaux, l’État, la collectivité territoriale de Martinique, les collectivités locales ainsi que la grande distribution s’engagent sincèrement dans une démarche de révision profonde de notre modèle économique. Le statu quo n’est plus acceptable."
Les militants CFDT souhaitent par ailleurs que l’État repense la gestion du patrimoine foncier agricole local. « Nous avons besoin d’une réforme ambitieuse qui permette aux agriculteurs d’exploiter davantage de terres afin de nourrir la population locale et de réduire notre dépendance à l’importation. » Enfin, la CFDT Martinique appelle à favoriser l’installation d’enseignes de hard discount sur le sol martiniquais. "L’introduction de ces acteurs devrait accroître la concurrence et remettre en question les pratiques commerciales des distributeurs en place ; ces derniers sont souvent perçus comme ceux qui profitent d’une situation monopolistique pour imposer des prix élevés."

Le regard de notre RS CFDT FTV, Stéphane Zie Me

"Je sens qu'il y a beaucoup de nervosité dans l'air, je ne connais pas une seule personne qui ne soutienne pas le mouvement. Il y a beaucoup d'agacement, de colère, mais j'ai peur que le mouvement ne s'essouffle même s'il est légitime.

Depuis des années, des gens se battent contre le scandale de la Chlordécone ou les inégalités sociales, ce n'était pas un épiphénomène, la preuve. Là, on assiste à la cristallisation de tous ces problèmes sociétaux. Le fait d'être une ile créé aussi un isolement insupportable, on a l'impression que ces cris n'arrivent pas jusqu'à Paris. Nous sommes comme infantilisés, de devoir "passer" par Paris.

Je suis solidaire de ce mouvement, on a des enfants, on pense à eux aussi.
Dans l'entreprise, certains services fonctionnent en mode dégradé pour ceux qui sont bloqués sur la route, ça complique la vie quotidienne de ceux qui doivent se rendre au travail. Moi, ça m'est arrivé de devoir dormir chez une amie qui habite à côté de la station parce que je suis resté coincé sur la route.

Pour les reportages, on arrive à travailler correctement, nous ne rencontrons pas de problème particulier. Par contre, je regrette que durant de tels événements, on reste encore beaucoup dans le divertissement. Nous pourrions transformer nos programmes afin de donner davantage la parole aux citoyens, aux manifestants. C'est ça la proximité. Nous, services publics, devrions être au service du peuple et non dans une espèce de bulle ou de tour d'ivoire.

Il y aura un après, c'est certain. Il aura eu le mérite de montrer que les Martiniquais savent se rassembler avec détermination, force, mais raison. On sortira grandis de ces évènements. Un peuple qui se soulève, ce n'est pas rien, c'est une vague, canalisée pour le moment. Il faut que ça reste comme ça.

Quand je discute avec les gens, ils réfléchissent beaucoup, ils pensent au pays avant tout. C'est très rassurant. Certains sont à l'aise financièrement, mais sont dans la rue. Il y a une belle, réelle solidarité.

Pour la suite, je ne sais pas vraiment. Les discussions se poursuivent autour de l'octroi de mer. La baisse des produits alimentaires, elle, n'est pas pour le moment engagée, c'est là que ça bloque. Nous verrons bien. "















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